vendredi 22 mars 2024

Baisse de 4,8% des émissions de CO2 de la France en 2023: c'est bien, MAIS ...

Effectivement, nous pouvons nous réjouir, aux cotés du Ministre Christophe Béchu, de la "baisse inédite" de 4,8% des émissions de gaz à effet de serre en France en 2023, mais ne tombons pas dans l'autosatisfaction excessive et l'hypocrisie. Comme le rappelle La Croix du 22 mars 2024 il y a en effet des "raisons conjoncturelles" (notre activité productrice en berne) et, il y a surtout que ce chiffre en trompe l’œil "ne prends pas en compte les émissions importées". Or la France, qui continue à s'enfoncer dans la dette et à creuser son déficit commercial par son incapacité à produire les biens qu'elle consomme, importe toujours plus de produits carbonés: les capteurs solaires chinois (à très forte empreinte CO2), l'électricité charbon d'Allemagne pour combler notre déficit électrique des soirées d'hiver, le polluant gaz naturel liquéfié américain, nos carburants fossiles, etc. Résultat: si, par nos émissions nationales, un français moyen pollue un peu moins qu'un chinois, l'empreinte carbone réelle d'un français, une fois corrigée de notre solde import/export, est supérieure (d'environ 1 tonne de CO2 par an) à celle d'un chinois moyen. Nous avons donc encore du "pain sur la planche" climatique, car le dérèglement n'est pas que la faute des autres. Retrouvons au plus vite une souveraineté industrielle et énergétique décarbonée que nous avons collectivement en partie laissée saborder.

Jean-Luc Salanave


dimanche 12 novembre 2023

(suite) Dix raisons pour la France de sortir du marché européen de l'électricité: réponses des cabinets de E. Macron, B. Lemaire et A. Pannier-Runacher

La tribune EN OBJET a été adressée par courrier, le 10 octobre 2023, au Président Emmanuel Macron, ainsi qu'au Ministre de l'Economie Bruno Lemaire et à la Ministre de la Transition Energétique Agnès Pannier-Runacher.

Voici les réponses que nous avons reçues:

Réponse de la Présidence de la République:
"Monsieur Emmanuel MACRON, très attentif aux préoccupations que vous
exprimez, m'a confié le soin de vous assurer qu'il en a bien été pris connaissance. Aussi n'ai-je pas manqué de signaler votre démarche à Monsieur le ministre de
l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et à
Monsieur le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires."

Réponse du Ministère de l'Economie:
"Le ministre a bien pris connaissance de ces suggestions et il vous remercie de l'en avoir rendu destinataire. Toutefois, ce dossier entrant dans les attributions de la ministre de la Transition énergétique, votre courrier a été transmis au cabinet de Mme Agnès Pannier-Runacher en la priant de l'étudier et de vous tenir directement informé de la suite qui pourra lui être réservée."

Réponse de la Ministère de la Transition Energétique:
"Vous avez bien voulu faire part à Mme Agnès PANNIER-RUNACHER, ministre de la Transition énergétique, de vos propositions sur la sortie de la France du marché européen de l'électricité.
La ministre a pris connaissance de votre correspondance. Elle m'a demandé de la transmettre à la directrice générale de l'énergie et du climat, pour que vos idées puissent alimenter la réflexion sur ce sujet.
Elle m'a par ailleurs chargé de vous indiquer qu'elle ne partage pas l'objectif de sortie du marché européen de l'électricité. C'est pour cette raison qu'elle a obtenu le mardi 17 octobre un accord des 27 États membres de l'Union européenne conduisant à sa réforme au bénéfice notamment de l'énergie nucléaire française. Elle vous invite à en prendre connaissance."


En attendant, les dysfonctionnement du marché électrique européen ne sont pas réglés et leurs causes principales ne sont pas supprimées.
Bruno Lemaire, s'exprimant sur l'éventualité d'une sortie de la France du marché unique européen de l'électricité a lui aussi affiché son opposition, en arguant que notre pays ne pouvait pas se passer des interconnexions avec ses voisins (!) ... méconnaissant ainsi que les interconnexions et les échanges électriques transfrontaliers existaient et fonctionnaient de façon satisfaisante bien avant l'ouverture du marché unique européen. Il a par ailleurs confirmé sa position en faveur de la "concurrence à tout prix" et du maintien du soutien artificiel aux fournisseurs électriques alternatifs au détriment (c'est un fait) d'EDF et des consommateurs français, domestiques et industriels, qui, eux aussi, auraient pu légitimement prétendre à bénéficier des 42€ de l'ARENH plutôt que de voir ce cadeau enrichir des spéculateurs et des financiers pour satisfaire Bruxelles.
Il semble aujourd'hui que la priorité pour nos dirigeants ne soient plus de réduire les prix pour le consommateur, objet initial du marché électrique européen de la concurrence, mais plutôt de forcer les énergies renouvelables dans le système électrique à coup de privilèges et de priorités d'injection, au motif qu'elles sont décarbonées, sans reconnaitre, après une décennie de flambée des prix, que le coût exorbitant de leur intermittence disqualifie le système actuel des règles de marché choisies par l'Europe.
L'idée de la sortie du marché électrique européen, ou de sa réforme en profondeur, va, à n'en point douter, continuer à être portée par de nombreux citoyens et acteurs économiques et sociétaux, comme le CSEC d'EDF (comité social et économique central), la FED (fédération environnement durable), ... Faisons en sorte que ce thème du marché électrique et du retour à des prix bas soit au centre des élections européennes de 2024.

JLS le 12/11/23
 

lundi 9 octobre 2023

Dix raisons pour la France de sortir du marché européen de l'électricité (tribune J-L Salanave, qui sera publiée par UARGA le 10/10/2023)

 Dix raisons pour la France de sortir du marché européen de l'électricité

inspir_illustr_CFEL'énergie, dont l'électricité décarbonée sera demain la composante majeure, constitue le sang de toute économie et la clé du développement durable et équitable de nos sociétés.
A l'approche des élections de 2024 l'Europe doit tirer les leçons du dysfonctionnement de son marché électrique, et le réformer pour qu'il accompagne pleinement la transition écologique, économique et sociale de l'Union et de chacun de ses États souverains. Vu de France, où des voix s'élèvent pour que soient rétablis les avantages économiques, sociaux et climatiques de son système électrique historique, le bilan de vingt ans de "concurrence européenne" est très négatif. Non exhaustive, pas plus que les solutions qu'elle suggère, voici une liste de dix raisons de sortir du marché électrique européen et/ou de le réformer :

 

1. La hausse des prix est incontrôlée : le marché concurrentiel de l'électricité, issu des directives européennes de 1996, 2003, 2009 et 2019 avait pour ambition de faire bénéficier les consommateurs européens de prix bas et compétitifs en favorisant la concurrence entre les fournisseurs. C'est un échec. Ce marché a généré une hausse régulière et significative des prix, provocant, notamment en France, faillites d'entreprises et précarité pour les consommateurs domestiques (la hausse moyenne atteint 80% en 15 ans pour les ménages français)[1].

 

2. Le marché est instable : outre son renchérissement, le marché électrique européen a échoué à fournir aux économies européennes stabilité, sécurité et visibilité énergétiques. En décourageant l'investissement dans des moyens de production fiables et pilotables, il a généré un risque accru de pénurie, de coupures électriques ainsi qu'une hyper-volatilité des prix. Loin de la relative stabilité qui prévalait antérieurement, les prix horaires du marché peuvent désormais devenir négatifs en cas de productions renouvelables importantes, ou rebondir le même jour à plusieurs centaines d'euros/MWh.

 

3. L'Europe électrique a contraint de façon délétère les atouts spécifiques des États : afin de protéger leurs consommateurs des aléas d'un marché incertain, certains États ont négocié avec la Commission européenne des conditions dérogatoires, en échange desquelles la Commission a exigé des contreparties. Si la France n'a pas (encore) refusé d'ouvrir ses concessions hydrauliques à la concurrence (à la différence d'autres États) elle a en revanche tenu à conserver des tarifs réglementés (cf. TRV au § 4) et proposé en échange de créer une concurrence artificielle face à EDF (cf. ARENH au § 5). Malgré ces mesures et la profonde réforme [2] de son système électrique pour l'adapter au marché européen, la France a vu se dégrader tous ses atouts historiques, à savoir: son électricité à bas prix, atout majeur pour son industrie, pour les particuliers et pour ses voisins européens (France 1er pays exportateur mondial d'électricité), son indépendance et sa souveraineté (aujourd'hui contrainte d'importer éoliennes et capteurs solaires), la faible empreinte carbone de son électricité en avance de 30 ans (importations électriques européennes carbonées aujourd'hui).

 

4. Le marché européen a entraîné dans sa hausse les tarifs régulés des États : parmi les dispositions dérogatoires à la règle européenne de libre concurrence (cf. point 3), plusieurs États, dont la France, ont tenu à conserver des Tarifs Régulés de Vente (TRV) pour protéger les consommateurs domestiques et les petites entreprises. Malheureusement, contrainte en contrepartie de préserver des marges aux fournisseurs alternatifs s'approvisionnant à la fois sur l'ARENH et sur le marché, la France a dû dénaturer ses tarifs en les indexant en partie sur les prix de marché européen. Résultat, ces TRV n'ont pu empêcher les consommateurs français restés fidèles aux tarifs EDF de voir eux aussi leur facture électrique exploser (de 71% en 10 ans) [3].

 

5. L'ARENH (accès régulé à l'électricité nucléaire historique) est un échec : c'est le dispositif proposé en contrepartie du maintien du TRV et de la position dominante d'EDF (cf. § 3). Il prévoit la vente à prix coûtant (42€/MWh) de plus du quart de la production nucléaire d'EDF (100 TWh) à ses concurrents pour leur permettre de faire des offres au-dessous du TRV. Bilan : l'ARENH aura créé plusieurs dizaines de nouveaux "fournisseurs alternatifs", qui ont détourné d'EDF plusieurs millions de clients, mais qui n'ont pas pour la grande majorité d’entre eux, utilisé les milliards d'euros ainsi encaissés pour financer de nouveaux outils industriels de production électrique pour compléter le parc de production du pays. La loi Nome de 2010 imposait pourtant que tout fournisseur, historique ou « alternatif », dispose de capacités de production et d'effacement suffisantes pour assurer à tout moment le bon équilibre entre offre et demande d’électricité. L'ARENH est un échec économique, financier et industriel. Selon la Cour des Comptes il a déjà coûté au moins 7 milliards d'euros de « manque à gagner » à EDF sur 2011-2021, auxquels s'ajoutent 8 milliards d'euros de pertes causées par les 20 TWh supplémentaires imposés par Bercy à EDF juste avant la présidentielle de 2022. L’Autorité de la Concurrence, dressant le bilan des "objectifs assignés à l’ARENH, à savoir l’émergence de la concurrence à l’amont et la baisse significative des prix de détail en aval", constate : "Or aucun de ces objectifs n’a été atteint"[4].

 

6. La déroute du marché a imposé aux États des interventions internes coûteuses : la flambée des prix électriques n’ayant pu être empêchée ni par le marché concurrentiel européen, ni par les TRV, ni par l’ARENH, la France a dû recourir à des interventions supplémentaires comme des chèques énergie et des boucliers tarifaires [5]Cette escalade du "quoi qu'il en coûte" a atténué la hausse des factures, mais sans parvenir à l'enrayer. Elle aura coûté plusieurs milliards aux contribuables ... mais sans s'attaquer aux causes. Par ailleurs, en amont, pour favoriser l'implantation (chère à Bruxelles) de producteurs étrangers en France, l’Exécutif ira même jusqu'à  proposer à certains des cadeaux anti-concurrentiels comme la gratuité du raccordement au réseau électrique afin d'abaisser facialement leurs coûts de production prohibitifs (exemple : parc éolien offshore de Saint Brieuc).

 

7. La Commission Européenne elle même reconnaît l'échec du marché européen : son étude d'octobre 2020, sur l’évolution des prix de l’électricité de 2008 à 2019 [6], conclut que les situations des ménages et de l'industrie européenne se sont dégradées par rapport à celles observées hors UE. Cet aveu d'échec confirme la prédiction de l'un des meilleurs spécialistes des systèmes électriques, Marcel Boiteux (1922-2023) [7], pour qui la libre formation des prix de l'électricité (un bien qui ne se stocke pas) par le seul équilibre commercial offre/demande ne peut fonctionner ; l'inertie commerciale conduirait en effet à dépasser les limites supportables des réseaux (fréquence, tension), causant des pannes. Cette inadaptation du marché électrique européen aux règles de formation des prix d'un marché concurrentiel classique a été encore amplifiée lorsqu'aux nécessaires injections/soutirages de réglage pilotées par les gestionnaires du réseau (hors transactions commerciales offre/demande) sont venues s'ajouter des injections intermittentes non sollicitées, sans lien avec la consommation (cf. §8).

 

8. Les privilèges accordés au photovoltaïque et à l'éolien sont la première cause de dysfonctionnement du marché électrique européen : ces privilèges anti-concurrentiels (obligation d'achat, priorité d'injection) accordés aux producteurs photovoltaïques et éoliens (sans les accorder, par exemple, à la production nucléaire, pourtant moins émettrice de CO2 [8]), et encouragée par le Traité Euratom) sont la cause majeure des dysfonctionnements (volatilité et hausse des prix, pénuries, risque de coupures, dépendance aux fossiles). En imposant de faire cohabiter depuis 15 ans des acteurs concurrentiels et des acteurs subventionnés l'Europe a enfreint trop longtemps les règles de la libre concurrence, désorganisé le marché, découragé l'investissement dans les moyens pilotables (sommés de s'effacer à chaque coup de vent ou de soleil, indépendamment de la demande de leurs propres clients) et au final fait flamber les prix pour les consommateurs, ainsi que les taxes pour les contribuables (bien avant la crise gazière russo-ukrainienne). La solution : mettre fin, progressivement mais rapidement, à la priorité d'injection et à l'obligation d'achat des MWh solaires et éoliens pour qu'émerge enfin une offre renouvelable mature et durable, "vendable à un consommateur final", une offre qui agrège dans un même "ruban électrique" des électrons intermittents et/ou des électrons stockés et/ou des électrons de backup pilotables, à un coût marginal non plus nul, mais incluant les externalités (coûts indirects) induites par ces énergies nouvelles.

 

9. La sortie de la France du marché européen de l'électricité n'interdirait pas  les échanges transfrontaliers (contrairement à certaines affirmations), ni la solidarité entre pays européens, ni les contrats électriques de gré à gré entre producteurs et industriels, nationaux ou européens: en effet ces échanges existaient avant la création du marché. Les États-Unis ont fait la démonstration que peuvent coexister, et pratiquer des échanges, des acteurs ou des États dérégulés (sous libre concurrence des prix) et régulés (avec des tarifs, voire des monopoles électriques intégrant production, distribution et commercialisation) [9]. Revenir à une EDF intégrée, proposant des tarifs et des contrats long terme basés sur ses coûts de revient, ne serait pas illégal au regard de la concurrence (la vente au-dessous du prix de revient est illégale). Il suffirait que la France accepte de soumettre la loyauté des comptes d'EDF au contrôle d'une autorité indépendante ou de la Commission Européenne.

 

10. En voulant faire de son système électrique non seulement un marché mais aussi un instrument de la lutte contre le dérèglement climatique, l'Europe a encouragé le développement débridé du solaire et de l'éolien, qui pour la France est contre-productif. En effet, son l'électricité nucléaire déjà décarbonée n'avait aucun bénéfice ni aucune complémentarité à attendre des renouvelables intermittents. Au final, en France, solaire et éolien sont (i) contre-productifs économiquement (après 15 ans d'aides, leur non-rentabilité nécessité toujours des subventions - taxes CSPE et TICPE, dont n'a jamais eu besoin le nucléaire), (ii) anti-écologiques (ils sont responsables de rejets de CO2 supérieurs à ceux du nucléaire [8]), (iii) sources de dépendance énergétique accrue (ils sont importés), (iv) consommateurs de plus de surfaces (et donc de biodiversité) et de plus de ressources naturelles (métaux critiques, béton), (v) injustes socialement (bénéficiant à des particuliers aisés et à la finance dite "verte", mais financés par des taxes imposées à tous), (vi) et enfin, injustes commercialement par la distorsion de concurrence que leurs productions prioritaires imposent au nucléaire en le contraignant à s'effacer à chaque coup de vent ou de soleil, au détriment de son facteur de charge, de sa rentabilité et donc de ses coûts, au détriment aussi de ceux qui parmi ses clients du moment sont attachés à une "garantie d'origine nucléaire" de leurs électrons !

 

En conclusion:  la vocation d'un marché concurrentiel est d'adapter une offre à une demande, au meilleur prix. Or, prétextant des objectifs climatiques louables (et des obligations de moyens discutables) l'Europe a demandé l'inverse au marché électrique européen, à savoir, adapter la demande à des offres intempestives d'électrons renouvelables intermittents. Ce marché doit être réformé, son offre doit être normalisée pour rétablir une concurrence loyale entre tous les fournisseurs et toutes les technologies de production, selon leurs seuls mérites respectifs. Chaque État membre devra alors être libre d'adopter les règles de ce nouveau marché, ou bien d'en sortir (service public de l'électricité, tarifs régulés basés sur les coûts de revient du producteur national), ou encore d'en sortir partiellement (en laissant aux ménages et entreprises le choix entre tarifs régulés et prix de marché). Les échanges transfrontaliers, indispensables, devront sans doute eux aussi voir leurs règles adaptées à ce nouveau marché, pour permettre la solidarité européenne et satisfaire les besoins des consommateurs et de nos économies.


Jean-Luc Salanave, le 9 octobre 2023

 


[1] En 15 ans, de 2007 à 2022, le prix de l'électricité pour les ménages français a augmenté en moyenne de 80%, passant de 115 à 207 €/MWh TTC en euros courants (source: statistiques.developpement-durable.gouv.fr, SDES)

[2] La séparation de RTE en 2000 puis la Loi NOME de 2010 (nouvelle organisation du marché de l'électricité) mettent fin à EDF comme opérateur national historique intégré (producteur, transporteur, fournisseur): création de l'ARENH au bénéfice de fournisseurs alternatifs, suppression des TRV pour les grandes et moyennes entreprises, création du marché de capacité (pour gérer les pointes).

[3]  La part variable TTC des TRV (tarifs régulés de vente) des consommateurs français résidentiels passant de 132,9 €/MWh en août 2013 à 227,6 €/MWh en août 2023, soit +71% (source CRE, Commission de Régulation de l’Énergie).

[4] Autorité de la Concurrence-Avis n°22-A-03 du 25/2/2022- §145

[5] Les boucliers tarifaires ont eu comme objectifs de contenir la hausse des prix de l'électricité à +4% en 2022 et +15% en 2023 pour les particuliers.

[6] European Commission, Study on energy prices, costs and their impact on industry and households, 2020,  https://op.europa.eu/en/publication-detail/-/publication/16e7f212-0dc5-11eb-bc07-01aa75ed71a1/language-en, p.71 et 289.

[7] Marcel Boiteux, revue Futuribles-n°331-Juin 2007-https://www.futuribles.com/les-ambiguites-de-la-concurrence-electricite-de-fr/

[8] Photovoltaïque 56 grammes de CO2/kWh; éolien 14 gCO2/kWh; nucléaire 4 gCO2/kWh (sources: Centre Commun de Recherche de la CE; Ademe)

[9] https://www.publicpower.org/resource/retail-electric-rates-regulated-and-deregulated-states-2021-update

mercredi 19 juillet 2023

TotalEnergies va rater le virage de sortie des énergies fossiles (billet de JL Salanave dans La Croix du 19/07/2023)

Réaction à l'interview de Patrick Pouyanné le 28/05/2023 par La Croix qui rapporte les oppositions de chrétiens, d'Africains et d'écologistes: 

Heureusement que des chrétiens et d’autres s’élèvent contre les projets pétroliers et gaziers de TotalEnergies en Afrique.

Heureusement qu’en donnant la parole à son PDG, La Croix précise qu’elle « ne cherche pas à le justifier ». Comment justifier, en effet, que notre champion national continue à miser autant sur le développement du gaz naturel liquéfié, avec la mauvaise excuse qu’il émet deux fois moins de CO2 que le charbon… dont TotalEnergies est déjà sorti depuis 2015 [ndr: donc pas de gain CO2 pour Total]! Le gaz naturel n’en reste pas moins catastrophique pour le climat ! D’ailleurs ne serait-il pas de meilleur aloi de préférer l’appellation « gaz fossile », plutôt que « gaz naturel »? Mais surtout, il y a tellement d’énergies décarbonées durables (y compris non intermittentes) que les 19 milliards d’euros de profits générés en 2022 par TotalEnergies permettraient de développer, en France et en Afrique !

Jean-Luc Salanave


PS (non publié): tout comme Engie, TotalEnergies semble vouloir s'entêter à privilégier encore longtemps sa spécialité de producteur d'énergies fossiles et donc de grand pollueur climatique. Rien dans ses projets pour s'intéresser en particulier au nucléaire du futur (alors que ses seuls profits d'une année suffiraient à financer 2 ou 3 réacteurs EPR, ou des dizaines de petits réacteurs pour l'Afrique, ou pour la génération d'hydrogène) ! Quand les profits financiers court terme passent avant les dégâts climatiques aux générations futures !

Article La Croix ICI

mercredi 29 mars 2023

Le monde de l'énergie: comment les renouvelables font flamber les prix de l’électricité

Tribune publiée le 27/03/2023:

https://www.lemondedelenergie.com/comment-renouvelables-font-flamber-prix-electricite

Par Jean-Luc Salanave, Scientifique de l'énergie, professeur à l'école CentraleSupélec, expert de PNC-France (Patrimoine Nucléaire et Climat), auteur de la BD "le virus anti-nucléaire", ancien industriel

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Comment les renouvelables font flamber les prix de l'électricité

Les prix de l'électricité n'ont pas attendu la guerre en Ukraine pour grimper. En dix ans, l'introduction à marche forcée du photovoltaïque et de l'éolien dans le mix électrique français avait déjà provoqué une hausse de 50% des factures (hausse qui aurait pu être pire sans l'effet stabilisateur du nucléaire, comme en témoignent les factures chez nos voisins moins nucléarisés).

Certes, à la différence des "gilets jaunes", de nombreux citoyens ont accepté sans trop rechigner de subventionner solaire et éolien (déjà plus de 150 milliards d'euros en France, 500 milliards d'euros en Allemagne) jusqu'à ce qu'ils deviennent compétitifs et autonomes. Mais étions nous conscients qu'un autre privilège plus discret allait dégrader profondément le marché de l'électricité, au point de provoquer pénurie, risques de coupures et hausse des prix ?

Ce privilège (lié, en France, à l'obligation d'achat imposée à EDF) c'est la "priorité d'injection", ou encore priorité d'accès au réseau électrique. C'est le passe-droit, accordé aux producteurs renouvelables, de pouvoir injecter leur électricité sur le réseau sans aucune contrainte temporelle, commerciale ou technique ( c'est-à-dire au gré de la météo, indépendamment de la demande, ou de la stabilité en tension/fréquence du réseau).

Du coup, les injections devant, comme chacun sait, équilibrer à chaque instant la demande, ce sont les autres producteurs électriques, pilotables, qui sont tenus de s'ajuster aux caprices de la météo, à la baisse ou à la hausse. Produisant tantôt plus, ou tantôt moins qu'ils ne le souhaitent, leurs outils et leurs coûts de production se sont dés-optimisés.

L'Europe sous la pression Allemande, en confondant l'objectif (émettre moins de CO2) et les moyens (renouvelables), a ainsi provoqué le remplacement de moyens de production électriques pilotables (non aidés et non prioritaires) par des non pilotables (solaires et éoliens, généreusement subventionnés), dissuadant le maintien et le renouvellement des premiers.

En une décennie la France a abandonné 11 gigawatts de capacités électriques thermiques pilotables (pourtant précieuses et mobilisables lors des pointes hivernales), passant de 92,2 GW 1 en 2011 à 81,5 GW 2 en 2021. De nombreux électriciens européens, jadis florissants, ont été contraints de faire de même et de fermer des capacités pilotables, ou de les maintenir en secours au prix de coûts fixes que les renouvelables ne sont même pas tenus de leur compenser.

Le parc renouvelable a pris une telle ampleur que chaque fois qu'un coup de vent ou de soleil inonde le marché européen de kilowattheures "prioritaires", l'obligation d'achat dont bénéficient ces derniers impose aux autres producteurs d'électricité une obligation d'effacement équivalente, voire de coûteuses mises à l'arrêt.

A l'inverse, lorsque cette électricité intermittente est en panne ou faible, en moyenne environ les trois quarts de l'année, la pénurie de moyens pilotables oblige le marché à faire appel aux moins rentables, aux plus chers et aux plus polluants, dont le coût marginal, gonflé par le cours du gaz et la taxe carbone, tire immanquablement les prix du marché vers le haut.

Il est temps de mettre fin à la priorité d'injection. Ce serait la mesure la plus efficace pour sortir le marché électrique européen de sa spirale infernale et revenir à un cercle vertueux au bénéfice des consommateurs et de l'économie.

Pour cela il suffit que les producteurs éoliens et solaires deviennent des "gestionnaires d'équilibre" normaux sur le réseau, ayant à charge, comme tous les autres acteurs (ou groupes d'acteurs), d'équilibrer à chaque instant les injections/soutirages de leur "périmètre d'équilibre", constitué de leurs propres injections (kWh renouvelables, kWh gaz ou de déstockage) et des soutirages de leurs clients.

Certes ils devront se doter des moyens de stockage ou de production de secours qui leur manquent, afin d'offrir aux consommateurs une électricité qui satisfasse enfin la demande en temps et en quantité, sans que les producteurs pilotables n'aient plus besoin de leur servir de "béquille" au détriment des prix et du service rendu.

C'est à ce prix, l'abandon de la priorité d'injection, que les opérateurs renouvelables pourront à leur tour devenir durables, utiles et vertueux pour nos économies et pour le climat, et le marché sortir de la crise.

1. France(2011), capacité de production électrique thermique pilotable 92,2 GW: nucléaire 63,1 GW; fuel 10,4 GW; gaz 9,5 GW; charbon 7,9 GW; thermique renouvelable 1,3 GW (en dehors du thermique, l'hydraulique représentait 25 GW , éolien + PV 9 GW) - source RTE .

2. France (2021), capacité de production électrique thermique pilotable 81,5 GW: nucléaire 61,4 GW; fuel 3,3 GW; gaz 12,8 GW; charbon 1,8 GW; thermique renouvelable 2,2 GW (en dehors du thermique, l'hydraulique représentait 25 GW , éolien + PV 32 GW) - source RTE .

dimanche 5 février 2023

Électricité, les renouvelables font flamber les prix !

 


Résumé: les prix de l'électricité n'ont pas attendu la guerre en Ukraine pour grimper. C'est l'OBLIGATION D'ACHAT, ce privilège accordé à l'éolien et au photovoltaïque depuis quinze ans, qui a fini par détraquer le système électrique européen. Certes, en les soustrayant ainsi provisoirement aux règles de la concurrence libre et équitable tout en les subventionnant généreusement, on a permis à ces deux énergies prometteuses de devenir plus compétitives et de se développer. Mais ce développement à marche forcée des renouvelables s'est accompagné en Europe d'une réduction des capacités pilotables de production électrique, avec deux effets: (i) l'un climatique (tantôt positif, lorsque cette réduction a fait baisser les émissions de CO2; tantôt négatif dans les cas inverses), (ii) l'autre effet étant la profonde dégradation du marché de l'électricité et son cortège de dysfonctionnements: volatilité, pénuries, risque de coupures, hausse des prix.

Voyons plus précisément pourquoi...

L'obligation d'achat c'est quoi ? C'est le (passe)droit, accordé aux producteurs d'énergies renouvelables variables, de pouvoir injecter leur électricité sur le réseau sans aucune restriction temporelle, commerciale ou technique (au gré du soleil et de la météo, indépendamment de la demande du marché et de l'état de stabilité du réseau - en tension et fréquence).

En pratique, cette électricité fatale est achetée par des opérateurs désignés, comme EDF en France, et bénéficie d'un complément de rémunération ou d'un tarif incitatif garanti. Des taxes citoyennes sur les carburants et l'électricité - parfois dites "taxes gilets jaunes" - remboursent ensuite EDF du trop payé.

A l'inverse, les productions électriques pilotables sont tenues à chaque instant de s'ajuster (à la baisse ou à la hausse) aux demandes du marché et à celles des gestionnaires du réseau. Elles assurent donc aujourd'hui une tâche supplémentaire ingrate: la compensation des sautes d'humeur des productions intermittentes.

On est bien loin du principe de l'équilibre offre/demande, libre et concurrentiel, dont l'Europe rêvait pour garantir aux consommateurs des électrons disponibles à tout moment et à bas prix.

L'obligation d'achat pour quoi faire ?

Rappelons que c'est la lutte contre le réchauffement climatique qui devait guider la "transition énergétique" vers un avenir moins carboné (et plus électrifié). Mais l'Europe, n'échappant pas aux pressions de puissants lobbies, a parfois confondu l'objectif (émettre moins de CO2) et les moyens.

En réservant l'obligation d'achat aux seules productions fatales intermittentes, elle a provoqué le remplacement de capacités électriques pilotables (ne bénéficiant pas de l'obligation d'achat) par des non pilotables (solaires et éoliennes), avec des effets mitigés sur le climat, et délétères sur le marché électrique.

Comme prévu, les effets climatiques sont positifs dans les pays où photovoltaïque et éolien ont permis de réduire l'utilisation des capacités électriques fossiles, émettrices de CO2.

Mais dans d'autres pays les renouvelables se sont en partie substitués au nucléaire (arrêt de Fessenheim en France, sortie du nucléaire en Allemagne), avec des conséquences alors contre-productives sur le climat, car éolien et solaire sont malheureusement plus carbonés que le nucléaire 1.

Mais indépendamment de ces efficacités climatiques inégales, l'obligation d'achat a surtout eu des conséquences graves sur le marché électrique en modifiant la structure de l'offre.

Devenu hybride, c'est à dire mêlant producteurs concurrentiels (qui sont normalement la règle) et acteurs renouvelables prioritaires et subventionnés, le marché européen est tombé petit à petit en ruine, entraînant difficultés et parfois faillites chez des compagnies électriques jadis florissantes.

Rappelons comment se forme le prix de l'électricité (graphique):

Contrairement à une idée erronée, le prix européen de l'électricité n'est pas "indexé" sur le gaz.

Sur un marché électrique sain et concurrentiel, pour un niveau donné de la demande, le prix spot se forme à chaque instant en empilant, par ordre de leurs mérites, les moyens de production disponibles, en commençant par les moins chers jusqu'à ce que l'injection soit égale au soutirage, l'électricité n'étant pas stockable .

Or, aujourd'hui cet ordre du mérite a dû céder la première place aux productions "fatales" intermittentes dont la priorité d'injection sert de "coupe file" en leur conférant un coût marginal nul.

Résultat: chaque fois qu'un coup de vent ou de soleil sur l'Europe inonde le marché de ces kilowattheures "prioritaires", leur obligation d'achat impose aux autres producteurs d'électricité une obligation d'effacement équivalente.

Un symptôme inédit de ce marché devenu fou a même fait son apparition: les prix négatifs. Lorsque vent et soleil conjuguent leurs excès en période de faible demande, les prix spot peuvent devenir négatifs, obligeant les producteurs pilotables à arrêter leurs usines. Un objet dont le prix est négatif - ce qui revient à payer pour s'en débarrasser, comme ces électrons renouvelables inutiles, ne s'appelle-t il pas communément un déchet ? Ainsi on a vu EDF obligé d’acheter à la Suisse l’effacement d’une surproduction (ça s'appelle céder le beurre et l'argent du beurre).

Le parc renouvelable prenant de l'ampleur, ces effacements intempestifs répétés ont dégradé la rentabilité des productions pilotables et dissuadé les nouveaux investissements non aidés. Le dysfonctionnement inverse est alors apparu: la hausse généralisée des prix !

En effet, quand les moyens de production pilotables bas carbone et bon marché deviennent insuffisants (comme c'est le cas après dix ans de dérèglements et de désinvestissements 2), le marché doit, pour satisfaire la demande (voir graphique), faire appel aux installations non-rentables, ou aux plus polluantes (comme le charbon à forte taxe carbone, ou le gaz dont le cours a flambé). C'est donc le coût marginal élevé de ces centrales fossiles d'appoint, celles qui fournissent les derniers électrons équilibrant offre et demande, qui fixe le prix de marché de la totalité de la tranche horaire.

Note: si le marché affichait un prix plus bas, ces moyens d'appoint produiraient à perte, ou ne seraient tout simplement pas démarrés, au risque de provoquer le blackout redouté.

Depuis fin 2020, le prix moyen du "marché à terme" a donc fini par s'orienter à la hausse (plus de 400 euros/MWh pour un "ruban 2023 de consommation constante sur 12 mois "), tiré par un marché spot au dessus de 1000 euros/MWh certains jours. Finies les deux confortables décennies de prix inférieurs à 50 euros/MWh !

Amplifiés par la crise du gaz russe, ces prix hauts jamais vus font aujourd'hui le malheur des consommateurs ... mais la fortune des gaziers, et aussi des traders français d’électricité ARENH (qui sont autorisés à piller EDF et le consommateur français en arbitrant entre l'ARENH et le marché).

La France, un exemple caricatural de mauvaise gestion énergétique nationale et européenne

En une décennie notre pays a abandonné 11 gigawatts de capacités électriques thermiques pilotables (pourtant précieuses et mobilisables lors des pointes hivernales), passant de 92,2 GW 3 en 2011 à 81,5 GW4 en 2021 (soit dix ans et 100 milliards d'euros de taxes et subventions aux ENRi plus tard).

Résultat, après avoir été le plus gros exportateur mondial d'électricité pendant 20 ans, notre pays subit une montée inexorable des prix et une pénurie d'électrons pilotables aux heures de pointes. La France ne sait même plus maîtriser ses TRV - tarifs régulés de vente ; basée hier sur nos coûts de production stables et bas, leur formule est aujourd'hui en partie indexée sur le marché.

Notre pays, qui n'a pas connu de panne depuis le 19 décembre 1978, craint maintenant des coupures d'électricité, et n'a d'autres solutions que les importations d'électricité et, pire, les effacements, forcés ou négociés, qui réduisent un peu plus la production des entreprises déjà au plus bas dans le désert industriel qu'est devenu notre pays !

Aux armes citoyens et consommateurs ! Demandons l'abolition de ce privilège féodal qu'est l'obligation d'achat ! Sachons rectifier nos erreurs et retrouver notre souveraineté électrique. Éolien et photovoltaïque ont bénéficié durant quinze ans de l'obligation d'achat, ainsi que de nos taxes et subventions (des centaines de milliards d'euros). Il est temps désormais de placer ces deux énergies prometteuses dans le "grand bain" des réalités énergétiques, elles doivent finir de s'émanciper pour apporter enfin aux citoyens qui les ont financés les bénéfices attendus. Pour ça, demandons un MORATOIRE SUR L'OBLIGATION D'ACHAT 5. Éolien et photovoltaïque en bénéficient depuis trop longtemps. Rétablissons une électricité durable, équitable et bon marché, dans un système européen assaini où chaque source d'électricité se repositionnera, comme jadis, selon ses mérites techniques, économiques et climatiques. Certes les producteurs et fournisseurs photovoltaïques et éoliens devront se doter de moyens de stockage ou de production pilotable complémentaires, afin offrir à leur clients (ou à eux mêmes pour les auto-consommateurs) une électricité qui satisfasse enfin la demande en temps et quantité 6. Ce sera la contrepartie légitime du trésor financier que les contribuables leur ont avancé par leurs taxes et subventions. Juste retour des efforts consentis par les producteurs d'électricité décarbonée pilotable, c'est le prix à payer par les opérateurs renouvelables pour devenir à leur tour durables, utiles et vertueux pour nos économies et pour le climat.

Jean-Luc Salanave, le 3 février 2023

1. 56 grammes de CO2 par kWh photovoltaïque et 12 grammes pour l'éolien, contre seulement 4 grammes de CO2 par kWh nucléaire en France (environ: 1/4 pour les activités minières, 1/4 pour l'enrichissement et la fabrication du combustible, 1/4 pour la construction et l'exploitation des réacteurs, 1/4 pour le démantèlement futur et le traitement des déchets) - sources: Centre Commun de Recherche de la Commission Européenne, ou EDF, ou CEA.

Note: le GIEC affiche une moyenne mondiale de 12 grammes de CO2 par kWh nucléaire, plus élevée que la France qui bénéficie d'une électricité décarbonée à 90% pour ses activités nucléaires domestiques.

2. Pas moins de 18 réacteurs nucléaires (18 GW) auraient dû être construits progressivement au cours des 20 dernières années pour que la France soit capable de pourvoir aux pointes journalières de consommation d'hiver sans importer d'électricité carbonée de ses voisins ni démarrer ses propres capacités fossiles de production électrique polluante (sur rte-france.com/eco2mix ce déficit de 18 GW est observable en moyenne depuis au moins 5 ans).

3. France(2011), capacité de production électrique thermique pilotable 92,2 GW: nucléaire 63,1 GW; fuel 10,4 GW; gaz 9,5 GW; charbon 7,9 GW; thermique renouvelable 1,3 GW (en dehors du thermique, l'hydraulique représentait 25 GW , éolien + PV 9 GW) - source RTE .

4. France (2021), capacité de production électrique thermique pilotable 81,5 GW: nucléaire 61,4 GW; fuel 3,3 GW; gaz 12,8 GW; charbon 1,8 GW; thermique renouvelable 2,2 GW (en dehors du thermique, l'hydraulique représentait 25 GW , éolien + PV 32 GW) - source RTE .

5Si cette mesure européenne est pour nous prioritaire, d'autres mesures nationales sont urgentes: la France doit (1) abandonner ses TRV (tarifs régulés de vente) ou, à défaut, revenir à une formule qui ne soit plus indexée sur le prix de marché mais sur ses seuls coûts internes de production électrique et (2) abandonner l'ARENH ou, à défaut, le consacrer non plus aux spéculateurs et fournisseurs alternatifs, mais, directement et sans intermédiaires, aux PME et consommateurs français, qui bénéficieront enfin des 42 €/MWh dont ils sont "propriétaires" pour avoir financé depuis 40 ans le parc nucléaire.

6. Les "périmètres d'équilibre" constituent le dispositif qui permet à un au plusieurs producteurs, fournisseurs ou traders complémentaires de se constituer en "responsable d'équilibre" sur le réseau électrique, pour gérer un ensemble de points d'injection (productions) et soutirage (clients) en assumant la responsabilité de l'équilibre offre/demande. 


Cette note peut être téléchargée ici

dimanche 27 novembre 2022

Echange avec un correspondant chinois sur l'ENERGIE et le COVID

France, le 27/11/2022:

Cher Chang*,

Merci pour ton message. Oui, nous allons bien et te remercions pour tes nouvelles.

Tu juges "critique" la situation dans ton pays. Elle est critique aussi en France, mais pour des raisons différentes:

1. Sur l'énergie, et malgré la flambée des prix observée depuis 2 ans (avant la guerre en Ukraine), notre Président Macron croit encore que l'éolien et le solaire photovoltaïque sont des solutions contre le dérèglement climatique. Mais il se trompe, car en France (à la différence de la Chine) ces technologies augmentent notre dépendance au gaz et font ainsi monter les prix de l'électricité en France et en Europe (le marché est indexé sur le gaz). E.Macron semble enfin prêt à suivre le modèle chinois et à lancer la construction (pas encore votée) de 7 nouveaux réacteurs nucléaires, mais il faudrait en construire rapidement plus de 20 en France pour ne pas dépendre de notre voisin allemand qui nous vend de l'électricité très sale et très chère (produite avec du charbon et du gaz) ! Plus de 50 nouveaux réacteurs seront nécessaires pour atteindre la neutralité carbone en 2050.

2. Sur le COVID, la propagande de notre gouvernement encourage toujours de vacciner la population alors que beaucoup de français ont déjà reçu 3 ou 4 doses. Mais à la différence de la Chine, nous avons la chance que le confinement n'existe plus en France depuis longtemps. Comme nos vaccins ne sont pas efficaces (ils n'empêchent pas d'attraper le COVID ni de le transmettre) nous avons tous attrapé le COVID et avons développé une immunité collective naturelle, comme pour les pandémies de grippe asiatique en 1958 et la grippe de Hong Kong en 1969. A l'époque, l'immunité individuelle et collective avait été obtenue en environ 1 an car il n'y avait pas de vaccins pour la retarder (et ces 2 pandémies avaient fait moins de morts en France que le COVID).

Bien amicalement.
Jean-Luc

*note: cet ami chinois habite une grande ville du sud de la Chine. Son nom a été modifié. Par discrétion son message d'origine n'est pas reproduit ici.

samedi 2 juillet 2022

"Le virus antinucléaire" s'invite à la cérémonie de clôture de la Présidence Française de l'UE

Le 28 juin 2022, au Centre Commun de Recherche Européen de Karlsruhe en Allemagne, s'est tenue une cérémonie sous les couleurs de la France, pour célébrer selon la coutume la fin des six mois de la Présidence Française du Conseil de l'Union Européenne.

Les conférences, qui se sont tenues à cette occasion devant le personnel du centre et des représentants du Joint Research Center (JRC, Direction de la Commission Européenne), ont été retransmises sur les autres centres Européen du JRC d'Ispra, Geel, Petten et Seville.

Malgré les sensibilités variées des Etats Membres sur la question du nucléaire civil, l'invitation qui m'a été faite de faire un exposé intitulé "the antinuclear virus" n'est pas une surprise quand on connait le rôle récemment joué par le JRC pour dénoncer les incohérences de la taxonomie financières "verte", pour démontrer que le nucléaire n'est pas dommageable (“there is no science-based evidence that nuclear energy does more harm to human health or to the environment than other electricity production technologies“), pour confirmer sa supériorité climatique (4,25 gCO2/kWh nucléaire, JRC report, march 2021) et pour rappeler les engagements du Traité EURATOM à développer cette énergie fondatrice dans l'UE.

Il se trouve que "le virus antinucléaire " est aussi le titre de la bande dessinée que je venais de publier.

Vous trouverez ci-dessous l'exposé, "the antinuclear virus", J-L Salanave, JRC, 28/06/2022:
TEXTE de l'exposé
PLANCHES simplifiées

Jean-Luc Salanave

Développer le solaire photovoltaïque en France est un péché écologique (JLS, La Croix, 2/6/2022)

Energies renouvelables ou énergies décarbonées ?!


E
lisabeth Borne pourrait accélérer sur les "renouvelables" (La Croix du 18 mai 2022) ! Confusion sur les termes, ou lapsus présidentiel volontaire ? Car le grand défi écologique c'est bien le dérèglement climatique et l'impératif planétaire d'abandonner les énergies carbonées au profit des décarbonées; renouvelables ou pas n'est pas le sujet ! D'ailleurs les citoyens ne sont pas dupes: si soleil et vent sont renouvelables, capteurs et éoliennes ne le sont pas ! Notre 1ère Ministre (n'en déplaise à l'Allemagne et aux spéculateurs "verts") serait donc bien inspirées de développer enfin les énergies décarbonées, qui sont loin de se limiter au solaire et à l'éolien. Les plus efficaces pour le climat, moins intermittentes, moins consommatrices de ressources naturelles, moins importées, sont: nucléaire, hydraulique, géothermie (dont pompes à chaleur), biogaz et biocarburants. Attention, la France est spécifique: y favoriser le photovoltaïque au détriment du nucléaire a été un péché écologique, en multipliant par plus de dix les émissions de CO2 de l'électricité remplacée (56gCO2 par kWh solaire - selon l'ADEME, contre 4gCO2 par kWh nucléaire - selon EDF et le CCR de l'UE). Nous comptons donc, Madame la Ministre, que vous agissiez enfin sur le climat à l'aide de toutes les énergies décarbonées.

Jean-Luc Salanave

Article La Croix ICI